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31 juillet 2013 3 31 /07 /juillet /2013 11:36

prisoner.gif

 

La théorie des jeux est un outil qui permet d'analyser des problèmes issus de l'interaction d'agents rationnels. Elle a connu son essor et ses premières applications à l'économie à partir de 1944, avec le célèbre livre de John von Neumann et Oskar Morgenstern The Theory of Games and Economic Behavior. On doit à John Forbes Nash l'introduction en 1951 du concept d'équilibre qui porte son nom, et qui correspond à une solution dans laquelle aucun joueur ne souhaite modifier sa stratégie étant donné la stratégie des autres. 

 

Pour les économistes, la théorie des jeux sert à analyser les interactions économiques sous la forme de jeux stratégiques, c'est-à-dire de jeux où les gains d'une personne dépendent à la fois de ses actions mais aussi de celles des autres. Rassurez-vous si vous vous sentez un peu perdu, il n'est pas question ici de faire un cours complet sur la théorie des jeux, mais juste de montrer son intérêt dans l'analyse économique au travers d'un jeu célèbre : le dilemme du prisonnier.

 

Le dilemme du prisonnier

 

C'est une situation où les intérêts individuels s'opposent à l'intérêt collectif. Imaginons donc que deux personnes, Franck et Raphaël, se fassent arrêter par la police pour un braquage d'une institution censée financer l'économie réelle et non l'économie-casino et qu'elles soient incarcérées dans des cellules isolées sans aucune possibilité de communiquer. Le commissaire de police ne disposant pas d'assez de preuves pour les accuser, il fait alors la même proposition à chaque prisonnier : soit il dénonce l'autre suspect, soit il se tait, mais la peine de prison dépendra de la réaction de l'autre suspect.

 

Plus précisément, s'ils se dénoncent l'un l'autre, alors ils écoperont de 10 ans de prison tous les deux; si les deux se taisent alors ils n'obtiendront qu'une toute petite peine de quelques mois (6 mois, donc 0,5 an) pour avoir fait obstruction au travail de la police; enfin si l'un des deux dénonce et l'autre se tait, alors le dénonciateur sortira libre tandis que l'autre prendra 20 ans !

 

Il s'agit bien d'un jeu stratégique au sens défini plus haut et il nous est possible de résumer les gains de ce jeu (plutôt les issues) dans une matrice :

 

 

prisonnier1-copie-1.jpg

Quelle est la meilleure stratégie dans ce jeu ?

 

Si Franck choisit de me balancer, euh je voulais dire balancer Raphaël, alors le meilleur choix pour Raphaël est de le dénoncer parce qu'il écopera de 10 ans de prison au lieu de 20 s'il se tait.

 

Et si Franck décide de se taire ? Le meilleur choix pour Raphaël est alors de le dénoncer parce qu'il sortira libre de prison  au lieu d'écoper 6 mois (0,5 an) s'il la boucle.

 

Ainsi, quel que soit le choix de Franck, Raphaël minimise son temps passé en prison en décidant de la dénoncer. On dit par conséquence que "dénoncer" est sa stratégie dominante dans ce jeu. Par symétrie, on notera que c'est la même chose pour Franck, qui aura donc tout intérêt à dénoncer Raphaël pour minimiser le temps passé en prison.

 

Les conséquences de cette stratégie rationnelle

 

La stratégie dominante de Franck étant la même que celle de Raphaël, c'est-à-dire dénoncer l'autre, les deux écoperont de 10 ans de prison. Ce n'est pourtant clairement pas l'issue la plus favorable pour nos deux lascars, puisque s'ils avaient choisi de se taire ils n'auraient eu que 6 mois de prison chacun !

 

Le dilemme du prisonnier montre donc qu'il existe des situations où les intérêts individuels s'opposent à l'intérêt collectif. En termes économiques, on dira que les stratégies dominantes individuelles débouchent sur un résultat qui n'est pas un optimum de Pareto... Dit simplement, la main invisible d'Adam Smith, qui doit en théorie permettre aux intérêts individuels de déboucher sur le meilleur choix collectif, va tout droit en prison et passe son tour...

 

Une application de ce jeu en économie

 

Supposons que sur le marché de l'automobile, il n'existe que deux grands constructeurs (toute ressemblance avec des entreprises existantes étant presque purement fortuite...) qui fabrique des voitures identiques. J'ai volontairement simplifié l'exemple, afin que le prix soit la seule variable que le consommateur prenne en compte lors de l'achat de son véhicule.

 

Chaque constructeur n'a dès lors que deux choix possibles : proposer soit un prix élevé soit un prix faible. La matrice des gains suivante indique alors les issues en termes de chiffre d'affaires pour chaque entreprise :

 

 

prisonnier2.jpg

 

Intuitivement, on comprend que si l'un des constructeurs fixe un prix élevé, l'autre pourra augmenter son chiffre d'affaires en vendant moins cher le même type de voitures. Plus exactement, il pratique une prédation par les prix qui a pour conséquence de capter l'essentiel du marché automobile. En revanche, si les deux entreprises fixent un prix de vente bas, alors elles se partageront certes un marché plus étendu puisque des prix faibles attirent de nouveaux clients, mais le chiffre d'affaires sera moins élevé en raison du faible prix de vente.

 

Or on peut montrer, comme précédemment, que la stratégie individuelle dominante pour chaque entreprise consiste à pratiquer des prix bas. L'équilibre de ce jeu consistera donc pour les deux entreprises à pratiquer des prix bas, alors qu'il aurait mieux valu pour elles pratiquer toutes les deux des prix élevés. On remarquera néanmoins que dans le cas d'espèce, un des bénéfices de cet équilibre est que les clients peuvent obtenir des prix plus bas !

 

Pour finir, je pense que le lecteur aura compris que le dilemme du prisonnier peut se résoudre très facilement si les deux suspects ont la possibilité de communiquer et d'aligner leurs intérêts personnels sur ceux de l'ensemble du groupe. C'est pourquoi les gouvernements incitent pêcheurs et agriculteurs à négocier lorsqu'il s'agit de faire face à la surpêche ou à l'utilisation abusive des engrais chimiques.

 

Une négociation permettra en effet de sortir de l'impasse où chacun à intérêt à poursuivre la production comme avant en laissant les autres payer pour le changement, ce que l'on appelle aussi un comportement de passager clandestin. En revanche, les gouvernements interdisent formellement aux entreprises de s'entendre sur les prix, puisque nous venons de voir que ce dilemme du prisonnier était favorable au consommateur...

 

N.B : on peut généraliser ce que je viens de décrire à des situations où il y a compétition pour l'accès à une ressource limitée commune. On appelle cela la tragédie des biens communs, suite à ce célèbre article de Garrett Hardin publié dans la revue Science en 1968. En 2009, Elinor Ostrom recevait le prix Nobel d'économie "pour avoir démontré comment les biens communs peuvent être efficacement gérés par des associations d'usagers".

 


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24 juillet 2013 3 24 /07 /juillet /2013 11:04

Taux-d-interet.jpeg

Dans la période récente, on observe que les banques détiennent des portefeuilles d'obligations publiques assez importants :

 

Dettes souveraines détenues par les banques des pays de la Zone euro et du Royaume-Uni (milliards d'euros)

 

Detentions-obligations-banques.jpg

 

[ Source : European Banking Association ]

 

Le Japon, quant à lui, affiche le record de détention d'obligations publiques par les banques :

 

Encours d'obligations publiques détenues par les banques au Japon (% du PIB)

 

Obligations-banques-Japon.jpg

 

[ Source : Natixis ]

 

Les banques détiennent de tels titres publics en raison essentiellement de leur qualité - surtout en cette période de crise -, qui permet de s'en servir comme collatéral auprès de la BCE pour se refinancer. Mais ces titres sont également recherchés par les banques pour leur liquidité, suite à la mise en place des normes prudentielles dites Bâle 3. Celles-ci obligent en effet les établissements financiers à augmenter leurs fonds propres et à maintenir un certain ratio de couverture des besoins de liquidité à court terme (Liquidity Coverage Ratio).

 

Cela signifie que la banque devra à l'avenir conserver suffisamment d'actifs liquides pour pouvoir les vendre facilement sur les marchés, afin de faire face à une situation de crise de liquidité sur une période de 30 jours. Remarquons que le régulateur semblait croire que toutes les dettes souveraines restent liquides en période de crise... Mais il est revenu partiellement sur cette vision en élargissant les réserves de liquidité aux obligations d'entreprises notées A+ à BB-, et à certains emprunts hypothécaires et actions.

 

Or, ces portefeuilles obligataires sont soumis à un risque de taux : lorsque les taux d’intérêt nominaux à long terme augmentent, les obligations valorisées aux prix de marché voient leur prix baisser, ce qui débouche sur des moins values et réduit les fonds propres des banques. On s'attend alors à un rationnement du crédit offert par les banques, ce qui aurait bien entendu des conséquences néfastes sur une éventuelle reprise économique. Dans un pays comme le Japon, les conséquences seraient encore plus désastreuses sur la situation des banques bien entendu et sur les finances publiques, puisque le pays a une dette publique de plus de 220 % du PIB !

 

La question est donc : existe-t-il actuellement un tel risque de remontée des taux d'intérêt à long terme ? La réponse est oui, comme le démontre la mini-panique qui a suivi les déclarations du président de la Fed, Ben Bernanke, évoquant l'arrêt programmé des politiques monétaires expansionnistes menées par la Banque centrale américaine. J'avais expliqué dans ce billet que les taux d'intérêt à long terme étaient maintenus très bas grâce à ces politiques, mais qu'il faudrait bien un jour fermer l'abreuvoir à liquidités financières, ce qui fera remonter les taux aux États-Unis... et pour notre plus grand malheur dans la zone euro, puisqu'on constate historiquement une corrélation entre les taux des deux côtés de l'Atlantique !

 

En ce qui concerne le Japon, la politique monétaire très expansionniste voulue par le nouveau gouvernement de Shinzo Abe se traduira par un doublement de la base monétaire d'ici fin 2014. D'où une remontée de l’inflation anticipée et une dépréciation du taux de change, qui débouchent sur une hausse des taux d'intérêt à long terme :

 

Japan-rate.jpg

 

[ Source : Bloomberg.com ]

 

En définitive, pendant que certains affirment que la reprise est là une autre catastrophe se profile...

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17 juillet 2013 3 17 /07 /juillet /2013 11:11

secret-bancaire-suisse.jpg

 

La révision de l'accord UE/Suisse sur la fiscalité de l'épargne donne lieu à d'interminables négociations. Aux termes de cet accord signé en 2005, la Suisse prélève un impôt sur les revenus de l'épargne des contribuables européens ayant un compte non déclaré en Suisse.

 

Plus précisément, il est prévu selon cette source que "les agents payeurs suisses opèrent une retenue d’impôt sur le paiement d’intérêts provenant de placements réalisés par des citoyens de l’UE en Suisse; cette retenue atteindra progressivement 35 % d’ici à 2011 (initialement : 15 %; depuis le 1er juillet 2008: 20 %; dès le 1er juillet 2011: 35 %). La Suisse transfère une partie des recettes provenant de cette retenue d’impôt aux pays de résidence des investisseurs, tandis qu’elle en conserve une partie pour couvrir ses frais administratifs". En moyenne, le produit de cet impôt revient à hauteur de 75 % aux États membres concernés de l’UE, le reste étant pour la Suisse. 

 

Recettes de la fiscalité de l'épargne versées par la Suisse aux pays de l'UE

 

Recettes-fiscalite-suisse.jpg

[ Source : Département fédéral des finances ]

 

Le point important est que les personnes étrangères qui touchent des intérêts peuvent dès lors choisir entre cet impôt et une déclaration aux autorités fiscales de leur pays. Devinez ce qu'elles choisissent le plus souvent ? L'Union européenne souhaiterait désormais que les autres revenus financiers, à l'instar des dividendes ou des plus-values, soient également concernés... Mais surtout qu'il y ait un échange automatique d'informations en matière fiscale !

 

Le poids de la finance en Suisse

 

Commençons par rappeler que la Suisse ne fait pas partie de l'Union européenne, ce qui a contraint le pays a choisir la voie des accords bilatéraux pour sortir de son isolement. Refusant ainsi l'échange généralisé d'informations en matière fiscale pour préserver son secret bancaire, la Suisse a signé, en 2005 avec l'Union européenne, l'accord décrit ci-dessus. Il est vrai que la Suisse est l'une des principales places financières mondiales, avec une forte spécialisation dans la gestion de patrimoines privés et institutionnels :

 

Fonds-transnationaux.jpg

 

[ Source : Genève Place Financière ]

 

Le secteur financier pèse ainsi près de 11 % du PIB du pays. En janvier 2013, selon le bulletin mensuel de statistiques économiques de la banque nationale suisse, les établissements bancaires géraient 4 640 milliards de francs suisses pour le compte de leurs clients, 47 % provenant de clients suisses et 53 % de clients étrangers.

 

Le secret bancaire en Suisse

 

Pour le dire simplement, le secret bancaire en Suisse désigne l'interdiction qu'ont les banques de ce pays de livrer des informations sur leurs clients à des tiers. Elle résulte de la loi fédérale sur les banques et les caisse d'épargne de 1934 qui, contrairement à une croyance populaire, n'a pas été instaurée pour éviter que les fonds juifs déposés en Suisse ne tombent aux mains des nazis, mais bien pour des raisons bassement commerciales.


Le secret bancaire suisse reposait jusqu'en 2009 (voir ci-dessous) sur la distinction entre soustraction et fraude fiscale, la non déclaration à l'autorité fiscale (donc la soustraction) n’étant pas suffisante pour lever le secret bancaire. On comprend dès lors pourquoi même si le secret bancaire peut être levé, cela reste tout de même exceptionnel. D'ailleurs, toute violation du secret bancaire tombe sous le coup du droit pénal, qui prévoit des peines d'emprisonnement jusqu'à 3 ans et des amendes pouvant atteindre 250 000 francs suisses.

 

Evidemment, un tel régime de secret bancaire quasi absolu permet l'évasion fiscale autant que le blanchiment d'argent sale. C'est pourquoi, afin de faire bonne figure, la Suisse a décidé de se conformer, depuis 2009, à l’article 26 du modèle de convention fiscale de l’OCDE. Mais il ne s'agit-là que d'un faible engagement à l'échange de données fiscales, puisque les États requérants doivent démontrer la pertinence prévisible des renseignements demandés...

 

La loi Fatca scelle le secret bancaire suisse


La loi FATCA (Foreign Account Tax Compliance Act) est l'équivalent d'une bombe atomique envoyée par les États-Unis sur la Suisse. Adoptée en 2010 par le Congrès américain, elle vise à lutter contre l’évasion fiscale des citoyens américains en cette période de finances publiques dégradées.

 

Elle impose aux institutions financières du monde entier, même celles qui n'opèrent pas aux États-Unis, de donner à l'administration fiscale américaine (IRS, Internal Revenue Service) toutes les informations dont elles disposent sur leurs clients assujettis au fisc américain. En cas de refus, les États-Unis se laissent le droit de taxer à 30 % toutes les activités de cette banque dans le pays - ce qui signifie la mort financière de l'établissement - et menacent même d'aller jusqu'au retrait de la licence bancaire !

 

Ainsi, la Suisse, mais aussi le Luxembourg et l'Autriche, ont accepté le principe de cette loi sous peine de se priver de l'accès au marché américain. Or, la directive européenne sur la coopération administrative fiscale contient une disposition comparable à celle de la « nation la plus favorisée », ce qui signifie que lorsqu'un État membre établit avec un autre État une coopération plus étendue que celle prévue par la directive, il ne peut refuser cette coopération étendue aux autres États membres.

 

Par conséquent, la Suisse devra concéder l'échange automatique de données fiscales aux pays membres de l'UE ! Quel que soit le temps qu'il faudra, le secret bancaire suisse est donc condamné à terme... d'où les mouvements importants vers les paradis fiscaux et bancaires asiatiques (Hong-Kong, Singapour,...).

 

Pour finir, je vous propose de regarder cette vidéo très instructive. Il s'agit de l'audition de Pierre Condamin-Gerbier, ancien banquier chez Reyl & Cie, par le Sénat. Il y a multiplié les révélations sur le système bancaire suisse et sur les techniques d'évasion fiscale, au point de déranger pas mal de monde depuis l'affaire Cahuzac (voir mon billet sur la transparence chez les élus). D'où peut-être son arrestation et son placement en détention préventive en Suisse il y a quelques jours ?

 

 

N.B : l'image de ce billet provient de cet article de 20min.ch

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10 juillet 2013 3 10 /07 /juillet /2013 11:17

Abreuvoir-copie-1.jpg

 

D'abord il y eut le rêve pendant quelques semaines :

 

Évolution du CAC 40 sur 6 mois

 

CAC-40-2013.jpg

 

[ Source : Boursorama.com ]

 

Évolution du Dow Jones sur 6 mois

 

DJ-2013.jpg

[ Source : Boursorama.com ]

 

Puis vint le réveil au mois de mai 2013, avec une correction marquée sur l'ensemble des marchés et en particulier celui des obligations d'État :

 

10-y-bonds.jpg

[ Source : Natixis ]

 

Ceci résulte pour une grande partie des déclarations du président de la Fed, Ben Bernanke, évoquant l'arrêt programmé des politiques monétaires expansionnistes menées par la Banque centrale américaine.

 

Qu'appelle-t-on une politique monétaire expansionniste ?

 

Ces politiques monétaires consistent, pour les Banques Centrales, à créer massivement de la monnaie (voir l'évolution de la base monétaire ci-dessous) pour acheter des actifs financiers sur les marchés, dans le but d'augmenter le prix de ces actifs et de faire baisser les taux d’intérêt à long terme.

 

Base monétaire

[ Source : Natixis ]

 

Ainsi, aux États-Unis, la Fed achète à la fois des titres publics et privés (risqués !), le tout pour 85 milliards de dollars par mois ! Au Japon, comme je l'avais expliqué dans ce billet, c'est carrément un doublement de la base monétaire qui est prévu d’ici la fin de 2014, ce qui signifie que la Banque du Japon va augmenter ses achats d'obligations d'État et même acquérir des actifs plus risqués (ETF, fonds communs immobiliers,...).


L'objectif est que lorsque la richesse (immobilière et/ou financière) des ménages augmente grâce à cette hausse des prix, ces derniers se remettent à consommer et à investir. C'est ce que l'on appelle l'effet de richesse, qui est beaucoup plus marqué aux États-Unis et au Japon qu'en Europe.

 

Les risques d'une politique monétaire très expansionniste

 

Tout d'abord, l'ouverture de cet abreuvoir à liquidités financières a rendu la taille des flux de capitaux internationaux préoccupante. En effet, cet argent, loin de servir l'économie réelle, sert surtout à la spéculation internationale, ce qui a en retour des conséquences négatives sur les fluctuations des taux de change.

 

De plus, cette politique monétaire, en faisant augmenter les prix des actifs, crée un risque de retournement des prix si elle devait s'arrêter. C'est précisément ce risque dont les investisseurs ont prix conscience avec les déclarations de Ben Bernanke, d'autant plus que les banques se sont gavées de produits financiers en tous genres...

 

Ce type de politique monétaire place donc le banquier central devant un dilemme cornélien : fermer l'abreuvoir à liquidités financières, au risque de provoquer un krach financier, ou poursuivre ces injections massives de fonds, qui certes permettent à l'économie américaine de ne pas couler grâce aux effets de richesse mais déstabilisent considérablement les marchés et peuvent déboucher sur de l'inflation. Voilà pourquoi les économistes évoquent souvent le risque d'irréversibilité d'une politique monétaire expansionniste.

 

En outre, des achats massifs d'obligations publiques font monter leur prix, donc baisser les taux d’intérêt à long terme. Ceci incite les investisseurs à se reporter sur des actifs financiers plus risqués pour obtenir une meilleure rentabilité, ce qui a pour conséquence un écrasement artificiel de la prime de risque (le retour des célèbres bulles)... et une prise de risque excessive !

 

Peut-on sortir de ces politiques monétaires actuellement ?

 

En raison de la situation très dégradée de l'économie réelle, c'est-à-dire tout sauf l'économie casino sur les marchés financiers, essentiellement due à la poursuite des politiques d'austérité, il est difficile de prévoir un arrêt de ces politiques monétaires expansionnistes.

 

Deux graphiques pour s'en convaincre :


Commerce des marchandises de certaines économies, flux trimestriels, 2010T1-2012T4
Indices du volume corrigés des variations saisonnières, 2010T1 = 100

 

Exportations-WTO.png[ Source : OMC ]

 

Évolution des salaires réels


Evolution-salaires-reels.jpg

[ Source : Natixis ]

 

Donc rien à attendre de la demande extérieure et encore moins de la demande domestique au vu du chômage et de la faiblesse des salaires réels...

 

En définitive, tant qu'on ne changera pas le logiciel global de pilotage de l'économie basé sur le triptyque austérité-compétitivité-inégalité, aucune amélioration ne sera possible !


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4 juillet 2013 4 04 /07 /juillet /2013 11:13

ancienne_television.jpg

La chaîne de télévision Air TV m'a invité dans son émission Bienvenue chez vous (avec Jean-Luc Bertrand) pour parler d'économie et évoquer la parution de mon dernier livre, La grande saignée économique. Je m'exprime à partir de la 28e minute :

 

Air-TV-02-juillet-2013.jpg

 

[ Cliquer sur la photo pour voir la vidéo ]

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28 juin 2013 5 28 /06 /juin /2013 11:18

Jobless.jpg

 

Depuis la parution de mon livre la grande saignée économique, je me suis beaucoup exprimé sur les politiques d'austérité et leurs conséquences (voir par exemple ici ou ). J'avais notamment donné une conférence à Saint-Avold, dans le cadre de l'Université du Temps Libre, avec pour sujet l'Europe est-elle condamnée à l'austérité ?.

 

J'ai cherché à expliquer les tenants et aboutissants des politiques de rigueur et à montrer qu'elles déboucheront sur une grande dépression de l'économie européenne. En effet, comme je l'avais rappelé dans cet article, les États continuent à appliquer les mêmes politiques néolibérales qui ont conduit à la crise. Pourtant, même le FMI a admis s'être trompé dans ses préconisations envers la Grèce ! Or, comme le disait Albert Einstein, "on ne résout pas un problème avec les modes de pensée qui l'ont engendré"...

 

Prenons garde de ne pas laisser l'Europe s'enfoncer dans une crise comme celle de 1929, d'autant que les conséquences sociales et politiques sont connues (et commencent à se faire sentir dans certains pays) :

 

 

Ci-dessous, voici l'article que le Républicain Lorrain a consacré à ma conférence :

 

RL-UTL-austerite-2013.jpg

 

[ Cliquer sur l'image pour l'agrandir ]

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22 juin 2013 6 22 /06 /juin /2013 12:22

Offshoring.jpg

 

S'il a beaucoup été question des délocalisations ces dernières années, c'est surtout pour grossir à l'extrême les rares relocalisations en France :

 

 

Le ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg, vient d'ailleurs de présenter vendredi 14 juin 2013 son plan de relocalisation des entreprises en France. Celui-ci comprend la mise en place d'un logiciel - baptisé Colbert 2.0 -, qui sera accessible sur Internet et permettra aux entrepreneurs, sur la base d'un questionnaire, de déterminer leur "potentiel de relocalisation".

 

Mais avant d'évoquer les relocalisations, peut-être faudrait-il d'abord se demander pourquoi les entreprises délocalisent ? Pour répondre à cette question, commençons par définir précisément ce que l'on entend par délocalisation.

 

Qu'est-ce qu'une délocalisation ?

 

Au sens large, il s'agit d'un transfert total ou partiel d'une activité vers une société implantée à l’étranger (appartenant ou non au groupe). Il peut donc ou non y avoir réduction de cette activité en France. C'est pourquoi, dans une définition plus restrictive, on appelle délocalisation uniquement les transferts d'activités avec réduction concomitante de la production en France.

 

La délocalisation doit être distinguée de l'externalisation qui consiste, pour une entreprise, à faire appel à une société extérieure au groupe pour réaliser une activité réalisée jusque-là en interne. La comptabilité est ainsi très souvent externalisée.

 

Pourquoi les entreprises délocalisent-elles ?

 

Dans mon dictionnaire révolté d'économie , j'avais qualifié les délocalisations de révolution dans la géographie des coûts salariaux permise par les politiques de libre-échange, la réduction des coûts de transport et le développement des télécommunications. Plus généralement, les délocalisations participent de l'éclatement au niveau mondial du processus de production et de la chaîne de valeur, dont j'avais parlé dans ce billet.

 

Notons qu'à la différence de la localisation, qui consiste à ouvrir un centre de production à l'étranger afin de bénéficier de coûts moindres permettant de conquérir le marché local, les délocalisations sont essentiellement motivées par l'eldorado d'une réduction des coûts (salariaux et/ou de production), qui permettra dès lors de casser les prix en France en important cette production. Et la recherche d'une rentabilité extravagante pour satisfaire les actionnaires n'est pas étrangère ce phénomène...

 

Pourquoi le coût salarial est un mauvais indicateur ?

 

Or, le coût salarial est un très mauvais indicateur puisqu'il ne tient pas compte de la productivité des salariés qui est, par exemple, plus basse en Chine qu’en France. Il est donc préférable d'utiliser le coût salarial unitaire, c’est-à-dire le coût salarial pour une unité produite.

 

Mais c'est encore insuffisant, puisqu’il existe des coûts lorsqu’on délocalise une unité de production (coût de gestion à distance, coûts cachés,…). C'est ce qu'explique bien l'industriel dans la vidéo ci-dessus. Ces coûts sont appelés coûts de transaction et sont souvent très élevés. Par conséquent, pour être en mesure de choisir ou non de délocaliser, un dirigeant devrait s’intéresser à l’évaluation de l’ensemble de ces coûts – que l’on appelle le coût total – et non pas seulement au coût salarial.

 

Quels sont les secteurs concernés ?

 

Très longtemps, les délocalisations ne concernaient que les secteurs à faible technologie de l’industrie manufacturière comme le textile. L'inquiétude est montée d'un cran lorsque le phénomène a commencé à toucher également les industries à plus forte intensité technologique comme l'automobile et les NTIC. La liste des salariés potentiellement confrontés aux dangers de la délocalisation dépasse dès lors le cadre des seuls emplois peu qualifiés pour s'élargir aux emplois qualifiés voire très qualifiés.

 

Delocalisations.jpg

 

[ Source : INSEE première N°1451, juin 2013 ]

 

Selon l’enquête Chaînes d’activité mondiales, au cours des trois années 2009 à 2011, 4,2 % des entreprises employant au moins 50 salariés ont délocalisé une partie de leur activité.

 

Vers quels pays ont délocalisé les entreprises françaises ?

 

L'enquête citée plus haut montre que, contrairement à l'idée que l'on se fait, 55 % des sociétés ayant délocalisé entre 2009 et 2011 l’ont fait vers l’Union européenne (cliquer sur le tableau pour l'agrandir) :

 

Delocalisations2.jpg

  [ Source : INSEE première N°1451, juin 2013 ]

 

Les délocalisations vers la Chine, l'Afrique et l'Inde représentent respectivement 18 %, 24 % et 18 %.


Quelles conséquences sur l'emploi ?

 

La mesure de l'impact des délocalisations sur l'emploi reste difficile en raison de l'absence de définition précise, de la complexité du phénomène, du manque d'informations fiables, du manque d'enquêtes publiques,... Quoi qu'il en soit, mesurer les délocalisations à partir des investissements directs à l'étranger (IDE) - méthode employée par Jean Arthuis pour son rapport de 1993 - ne conduit à rien de pertinent sinon au catastrophisme. On se souvient ainsi du vent de panique provoqué par la conclusion du rapport du sénateur Arthuis : "84 % des effectifs salariés de l'industrie (hors IAA ), correspondant à 81 % de la valeur ajoutée du secteur, sont délocalisables".

 

L’enquête Chaînes d'activité mondiales estime à environ 20 000 le nombre de suppressions directes de postes en France dues aux délocalisations entre 2009 et 2011. Près des deux tiers de ces suppressions se rapportent au coeur de métier des sociétés, c'est-à-dire pour faire simple à l’activité principale de la société. Mais attention, à ces postes supprimés directement dans les entreprises qui délocalisent il faut ajouter ceux perdus chez les sous-traitants, tout en tenant compte des emplois créés en France lorsque des entreprises étrangères délocalisent sur notre sol. Bref ce n'est pas simple à mesurer, mais on peut affirmer avec certitude qu'au niveau d'un bassin d'emplois une délocalisation provoque inévitablement un séisme économique et social...

 

 

Cette semaine, j'ai profité de mon passage sur Mirabelle TV pour évoquer cette question des délocalisations. C'est à voir  dans le Grand rendez-vous du lundi à partir de la 18e minute :

 

Mirabelle-17-juin-2013.jpg

 

[ Cliquer sur la photo pour lancer la vidéo ]


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18 juin 2013 2 18 /06 /juin /2013 10:41

ancienne television

La chaîne de télévision locale Mosaïk m'a invité dans son journal pour parler d'économie et évoquer la parution de mon dernier livre, la grande saignée économique.

 

Mosaik-17-juin-2013.jpg

 

[ Cliquer sur la photo pour voir la vidéo ]


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13 juin 2013 4 13 /06 /juin /2013 12:54

No-signal.jpg

 

Ceux qui pensaient que les politiques d'austérité étaient adoucies en Europe ou encore que la crise était finie, en sont désormais pour leur frais. En effet, l'image de ce billet est une capture d'écran de la télévision publique grecque ERT, qui a cessé d'émettre mardi soir sans préavis !

 

Si officiellement la mauvaise gestion de la chaîne est avancée pour expliquer ce geste sans précédent, personne n'est dupe qu'elle est la conséquence des pressions exercées par la Troïka pour obliger la Grèce à faire des économies. Ainsi, le Premier ministre grec, Antonis Samaras, a peut-être cru bon de respecter la feuille de route lui enjoignant à diminuer de plusieurs milliers le nombre de fonctionnaires au mois de juin, en s'attaquant brutalement à l'ERT et ses 2 700 salariés...

 

Mais ce faisant, il a pris le risque d'envenimer encore plus la situation sociale et politique du pays. Car c'est bien d'un geste politique dont il est question, quand bien même le gouvernement se défend-il désormais en invoquant l'opacité des comptes de la télévision publique. Certes, le budget annuel de l'ERT (300 millions d'euros) était probablement disproportionné en regard de l'audience cumulée (13 % !), et aucun grec n'ignorait que la télévision servait trop souvent à recaser des amis politiques. Mais la fermeture d'une télévision publique reste dans la conscience collective associée à l'idée d'un coup d'État...

 

On peut du reste s'interroger sur la réelle souveraineté politique dont dispose encore la Grèce, lorsque l'on sait que les créanciers internationaux exigent - et obtiennent - une réorganisation du service public et des privatisations qui conduisent à des coupes claires dans l'État-Providence. La coalition au pouvoir, c'est-à-dire les conservateurs d'Antonis Samaras, les socialistes du Pasok et la gauche modérée Dimar, semble n'être plus qu'une chambre d'enregistrement des diktats économiques européens...

 

Comme on pouvait s'y attendre, toucher au symbole que représente la télévision a immédiatement conduit les citoyens grecs dans la rue, pour une journée de grève générale ce jeudi 13 juin 2013. C'est certainement pourquoi la Commission européenne a préféré prendre ses distances dans un communiqué, confirmé par la réponse donnée par le commissaire aux affaires économiques et monétaires, Olli Rehn, à Daniel Cohn-Bendit :

 

 

En définitive, nous avons une nouvelle fois la preuve que les politiques d'austérité conduisent l’Europe vers le chaos social et politique, comme je le répète souvent sur ce blog. D'où l'actualité de mon livre, la grande saignée économique, que France 3 Lorraine m'a invité à venir présenter dans son journal le 12/13 :

 

 

 

N.B : l'image de ce billet provient de cet article de RTL.

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9 juin 2013 7 09 /06 /juin /2013 12:59

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On ne pouvait espérer pareil aveu de la part d'une institution néolibérale : dans une note interne rendue fort opportunément publique, le FMI vient en effet de reconnaître que le plan de sauvetage de la Grèce en 2010 s'était soldé par un échec. Et de citer deux raisons majeures comme explication : des prévisions de croissance et de réduction du taux d'endettement public trop optimistes - j'en avais parlé dans ce billet -, ainsi que des désaccords au sein de la tristement célèbre Troïka (BCE, FMI, Commission européenne).

 

Pour mémoire, la Troïka a conditionné son aide à la mise en place d'une dévaluation interne, c'est-à-dire une baisse des coûts salariaux et des prix dans le but d'améliorer la compétitivité d'un pays. Selon la théorie, comme les prix et les salaires baissent parallèlement, les salaires réels ne varient pas et la compétitivité s'améliore à l'export. Ceux qui souhaiteraient en savoir plus sur ces politiques pourront utilement se reporter à ce billet que j'avais écrit.

 

Je n'ai du reste eu de cesse de répéter que la Grèce se trouve dans une situation d'insolvabilité budgétaire et extérieure, qui ne peut s'améliorer par une relance de la compétitivité. Dit autrement, depuis 2007, la Grèce est devenue le cas d'école d'un problème d'insolvabilité traité fautivement comme un problème de liquidité...

 

Mais revenons un instant sur les désaccords au sein de la Troïka évoqués par le FMI. Au-delà du fait qu'il s'agit-là de propos très peu diplomatiques, l'institution dirigée par Christine Lagarde depuis 2011 explique qu'il aurait fallu restructurer la dette grecque dès 2010, mais que les Européens s'y sont opposés.

 

Il est vrai que Bruxelles avait une peur bleue d'avouer que la Grèce faisait face à un problème d'insolvabilité, qui ne pouvait se résoudre que par un défaut avec son lot de paniques et de cris d'orfraie. Le défaut arriva en 2012, mais trop tard pour sauver quoi que ce soit en Grèce et en particulier la Sécurité sociale. Le peuple grec a ainsi été sacrifié sur l'autel des grandes fautes économiques de l'histoire !

 

 

Pour finir, le Républicain Lorrain m'a interviewé suite à la sortie de mon livre, la grande saignée économique :

 

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[ Cliquer sur l'image pour l'agrandir ]


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